jeudi 7 avril 2011

Wayna Wasi

Après Cuzco, le plan était d'aller sauver le monde.

Oui, après 6 mois au Pérou, toujours pas de volontariat à mon actif, je virais donc passif. Cet impératif d'engagement, j'y répondrai alors peut-être en Apurimac, à Andahuaylas, à Illahuasi, à Santa Rosa, où, pendant deux semaines, le projet était d'équiper l'école maternelle de cette petite communauté en construisant un comedor (un espace pour que les mômes déjeunent), un juego infantil (pour que les mômes jouent) et des baños secos (vous traduirez).

Après une chaotique nuit de bus où mes tentatives d'assoupissement se sont vues réduites à néant par le différend entretenu par les les amortisseurs avec la piste, nous arrivons a Andahuaylas pour un café popotte sur les dalles de béton du terminal. La capitale d'une des régions les plus pauvres du Pérou ne paye pas de mine, immeubles de 3 étages rarement finis, grimés de couleurs kitschs, mototaxis, vendeurs ambulants à côté du marché où nous prenons un café entre deux montagnes de Lomo Saltado à 3 soles la plâtrée. Pas un blanc bec. Bientôt nous retrouvons deux membres de l'association Wayna Wasi qui nous emmènent rencontrer le reste de l'équipe qui arrive au compte goute à cause des caprices andins.

Le projet en lui même est à Santa Rosa, appartenant au village d'Illahuasi, perché dans la montagne à 3h de combi sans derrumbe (c'est la saison des pluies et les éboulements sont fréquents). Arrivés à Illahuasi, il faut encore monter, et il n'y a plus de route. Ce sera donc nos jambes, nos poumons et le matériel pour faire des allers-retours d'environ 1 heure dans la montagne. Le détail c'est qu'il faut aussi monter une centaine de troncs pour la construction. Heureusement, les types de la communauté nous aident avec leurs chevaux. La grimpette se justifie, bientôt nous voilà perchés dans un vert vif sous un bleu pur, dans coin de paradis andin. La nuit tombée nous installons nos quartiers dans une des deux salles de l'école.

S'en suivent deux semaines bien trop longues pour être racontées à cette échelle. Deux semaines d'écorçage, de sciage, de traçage, de pause déjeuné méritées, de vêtements boueux, de visages sales, de douches économisées, de déblayage de routes a main nues, d'échange avec les campesinos venus aider, de cuisine avec les mamitas, de monopoly et de maquillage avec les gamins, de délires avec les volontaires, de liens d'amitié, de cuisine dans la fumée, de dîner tous rassemblés. Bref, deux belles semaines d'un quotidien mêlant joie et labeur (joibeur).

Aussi une occasion de découvrir une association motivée et organisée (n'y lire aucune publicité, je raconte ma vie sur un blog hein) qui a su gérer les aléas inhérents au contexte, écouter et s'intéresser aux volontaires (interviews, tours de table). Ce qui m'a aussi séduit et j'y tiens c'est la philosophie du projet: voir ça sur le mode d'un échange, qui a eu lieu, avec les gens de la communauté. Que ce soit du travail ensemble plus qu'une aide verticale écoeurante de gringo venu se racheter une conscience en aidant les pauvres péruviens sous développés. Si c'était le cas, je ne m'en suis pas rendu compte parce qu'en repartant ému au bout de deux semaines, j'ai eu l'impression que l'action n'était pas vaine et que ça ne serait pas fait sans notre soutien. Un seul regret, l'attitude de ces mêmes gens que nous pensons avoir aidé et qui le dernier jour sont venus réclamer comme un du ce que nous leur aurions volontiers laisser: nourriture, outils, argent. Un comportement qui s'explique mais ne se défend pas et qui inspire, dans les moments de pessimisme, une petite amertume sur le genre humain. Au delà de ça, les fausses notes sont rares et je me suis rapproché de gens très loin de moi culturellement, une chance rarement comprise dans les tours opérateurs.

Ah, et puis le dernier week end il y avait le Pucklay, le carnaval d'Andahuaylas où, déguisé, notre petit cortège chantait, un peu éméché mais franchement heureux, Aux Champs Elysées dans les rues bondées de la petite ville.

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